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Entraînement : est-ce qu’un repos annuel implique de tout perdre ?

En fin de saison, il est difficile de maintenir l’entraînement au niveau où il était en pleine saison. D’où la question : si je m’entraîne moins, vais-je perdre toutes les qualités physiques que j’ai chèrement acquises ?

Observer une période annuelle de repos, c’est peut-être une bonne idée, notamment pour :
  • diminuer le risque de se surentraîner ;
  • éviter d’éventuelles blessures de surutilisation ;
  • retrouver l’énergie ainsi que la motivation nécessaires afin d’entreprendre avec entrain la prochaine saison ;
  • éviter de s’entraîner dans des conditions exécrables quand les conditions météo ne sont plus propices.

On peut toutefois craindre que le repos annuel complet ou la réduction de l’entraînement pendant quelques semaines s’accompagne d’une diminution catastrophique de nos qualités physiques. Vaut-il mieux s’entraîner intensivement toute l’année afin de ne rien perdre ?

Les rapports de recherche sur cette question font ressortir que chez les athlètes qui s’entraînent de manière extrêmement intensive, une période de repos est tout à fait souhaitable.

En effet, les athlètes de haut niveau qui ne prennent pas ou pratiquement pas de repos annuel sont plus vulnérables aux maladies infectieuses que ceux qui se donnent un congé de quelques semaines pour « recharger leurs batteries ».

Des chercheurs du prestigieux British Olympic Medical Centre (Angleterre) ont observé que 12 olympiens dont la performance avait subi une baisse intempestive en dépit d’un entraînement intensif avaient vu leur consommation maximale d’oxygène (VO2max) et leur endurance s’améliorer de manière significative après un repos de trois à cinq semaines.

Par ailleurs, l’équipe du professeur Rietjens, de l’Université de Maastricht (Pays-Bas), a démontré que l’aptitude aérobie des cyclistes de haut niveau diminue très peu lorsque la charge d’entraînement est réduite. Ces chercheurs ont demandé à leurs 12 jeunes sujets (des cyclistes dont le VO2max affichait une valeur enviable) de se restreindre, pendant trois semaines, à trois sorties hebdomadaires de seulement deux heures, soit la moitié du volume hebdomadaire auquel ils étaient habitués. Bien sûr, les sujets s’inquiétaient de voir leur aptitude aérobie fondre comme neige au soleil. Mais les tests de laboratoire qui ont précédé et suivi cette période d’entraînement réduit ont révélé que ces coureurs s’inquiétaient pour rien : aucun des indicateurs de forme n’a diminué de manière significative.

Chose certaine, les athlètes qui se préparent pour une compétition importante, comme les Jeux olympiques ou les Championnats du monde, observent une période d’affûtage qui comprend une réduction d’à peu 40 % à 60 % de leur volume d’entraînement (voir Affûtage : pour finir en beauté). Ils obtiennent ainsi un important gain de performance.

Il ne faut pourtant pas conclure qu’il n’y a aucun problème à stopper l’entraînement longtemps. Tôt ou tard, les qualités physiques que vous avez réussi à développer en vous entraînant intensivement seront perdues si vous faites l’ours trop longtemps.

J’en ai parlé avec mon ami Basque Iñigo Mujika, Ph.D., une sommité mondiale du désentraînement (entre autres sujets), qui a participé à l’encadrement scientifique du record de l’heure du champion cycliste Miguel Induráin et qui conseille maintenant l’élite espagnole en natation. Selon le professeur Mujika, chez les sujets qui ne sont pas surentraînés, plusieurs qualités physiques précieuses s’atténuent après plus de quatre semaines d’arrêt ou de réduction importante de l’entraînement : aptitude aérobie (VO2max, puissance aérobie maximale, endurance), volume sanguin, débit cardiaque (volume de sang éjecté par le cœur à chaque battement), efficacité respiratoire, activité des enzymes musculaires oxydatives, réserves musculaires de glycogène, nombre de capillaires sanguins entourant chaque cellule musculaire, etc.

De toutes ces études sur le désentraînement, que doit-on conclure ? Ceci :
  • Si vous êtes surentraîné, un repos complet de trois ou quatre semaines améliorera votre performance ;
  • Si vous avez fait pas mal d’entraînement sans toutefois vous surentraîner, une diminution de votre volume d’entraînement d’à peu près 50 % pendant un mois n’affectera pas votre condition physique ;
  • Si vous cessez complètement toute forme d’entraînement pendant plus de quatre semaines, vous perdrez une grande partie des qualités physiques que vous avez acquises au fil de vos activités estivales d’entraînement.

Comme le soulignent Olivier et coll. dans leur rapport de recherche « Arrêt de l’entraînement et déconditionnement à l’effort aérobie », les mécanismes du déconditionnement sont multiples, mais il semble que l’hypovolémie (réduction du volume sanguin), la baisse de l’activité des enzymes oxydatives et la diminution des réserves de glycogène musculaire soient les premiers éléments responsables de la réduction de la performance conséquente au désentraînement prolongé.

Bref, un repos annuel peut souvent être utile, à condition qu’il ne soit pas trop long !


Références

Cardiorespiratory and metabolic characteristics of detraining in humans (2001)
Arrêt de l’entraînement et déconditionnement à l’effort aérobie (2008)
A reduction in training volume and intensity for 21 days does not impair performance in cyclists (2001)


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

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