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Covid-19 : risque-t-on d’être infecté en courant ou en pédalant derrière une personne infectée ?

Un manuscrit scientifique d’ingénieurs civils belges et néerlandais (Blocken et coll.) indiquait qu’une personne courant à 14,4 km/h dans le sillage d’un autre coureur devrait se tenir à au moins 10 m pour éviter de recevoir des gouttelettes (émises en toussant, en éternuant ou en respirant) sur son torse. Plusieurs médias ont alors mis en avant l’idée que les cyclistes devraient rouler en se distançant de leurs camarades de peloton de bien plus que 10 m.

Même si l’étude n’avait pas encore été formellement publiée dans une revue scientifique, elle a eu un énorme retentissement médiatique pendant les premières semaines de la pandémie… jusqu’à ce que sa valeur et, surtout, ses applications pratiques soient mises en doute, particulièrement par des infectiologues, des virologues et des épidémiologistes.

D’ailleurs, les auteurs eux-mêmes avouent que leur étude ne porte que sur la physique des gouttelettes émises en mouvement, et non pas véritablement sur le risque d’être infecté.

Or, des études plus récentes font ressortir deux éléments majeurs :

  • primo, le risque d’infection au coronavirus est beaucoup plus faible à l’extérieur qu’à l’intérieur ;
  • secundo, pour qu’il y ait infection, il faut avoir été exposé à une grande quantité de virus en passant pas mal de temps en présence d’une ou de plusieurs personnes infectées.

On sait maintenant que le coronavirus pénètre surtout par les voies nasales. Il ne se rend pas immédiatement dans les poumons. Théoriquement, un seul virus peut rendre malade. Mais cela suppose qu’il aura infecté une cellule nasale en y rencontrant le bon récepteur cellulaire, et qu’il s’y sera reproduit. Le risque est donc très faible, pour ne pas dire négligeable. En réalité, les chances d’infection ne sont élevées que si un très grand nombre de virus aura été inspiré.

Sans connaître précisément la dose infectieuse minimale pour le coronavirus, les spécialistes croient qu’il en faut quelques centaines ou quelques milliers. Souvent, une infection à faible dose n’affectera qu’un seul organe (ex. les sinus), et demeurera asymptomatique, grâce aux premiers systèmes de défense immunitaire.

Certes, un éternuement peut disperser des dizaines de milliers de gouttelettes chargées globalement de millions de virus, soit beaucoup plus que la dose minimale infectieuse. Mais attention ! Les grosses gouttelettes tombent rapidement vers le sol ; une petite quantité seulement se rend à plus d’un mètre.

Le risque étant proportionnel à la charge virale, à la proximité entre les personnes et au temps d’exposition, on comprend pourquoi les lieux où le risque d’infection est le plus élevé sont ceux où l’air circule peu, où des gens conversent proches les uns des autres pendant de longues périodes de temps.


À propos de la diminution de nombre journalier de personnes atteintes au Québec, à la fin juin

« Ça confirme que les regroupements à l’extérieur, quand les gens font attention, sont moins problématiques que ceux à l’intérieur (…). Ça fait déjà plus de deux semaines qu’on a eu les manifestations au centre-ville, et on ne voit pas une augmentation outrancière du nombre de cas ; on voit plutôt une stabilisation vers le bas. »

« Ça confirme les données publiées qui suggèrent que ça prend un contact pendant un certain temps et dans un endroit fermé pour privilégier la transmission. »

— Nathalie Grandvaux, professeure titulaire, Département de biochimie et médecine moléculaire, Université de Montréal, citée dans La tendance se maintient, article du journaliste Tristan Péloquin, La Presse, 30 juin 2020.


Même si le risque zéro n’existe pas, on a de bonnes raisons de croire que la probabilité d’être infecté est très faible pendant la pratique en plein air d’activités aérobies comme la course à pied et le cyclisme, qu’il s’agisse de séances d’entraînement ou de compétitions.

Bref, le risque d’être infecté en courant ou en pédalant en peloton est plutôt mince – sans compter que les personnes infectées et symptomatiques n’ont pas tendance à s’entraîner en groupe ou à participer à des compétitions !

Rappelons que la pratique régulière d’activités physiques aérobies a un très grand nombre d’effets bénéfiques de tout ordre, fort bien documentés.


Références et lectures suggérées

Blocken B, F Malizia, T van Druenen et T Marchal Towards aerodynamically equivalent COVID19 1.5 m social distancing for walking and running.

Bromage E (2020) The Risks – Know Them – Avoid Them

Samuel S (2020) Why you’re unlikely to get the coronavirus from runners or cyclists. Understanding the key concepts of transmissibility and infectious dose should reassure you.

Sormany P. (2020) Covid-19 : évaluer les risques d’être infectés en fonction des lieux.


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

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