La créatine, molécule naturellement présente dans nos muscles et bien connue des athlètes, suscite autant de fascination que de controverses. Pour obtenir naturellement la dose quotidienne typique recommandée en supplémentation (3-5 g), il faudrait consommer environ 3 kg de hareng en une journée. Ce contraste saisissant entre l’apport naturel par l’alimentation et les doses recommandées en supplémentation soulève des questions légitimes : une telle différence n’est-elle pas le signe que ces suppléments dépassent les limites physiologiques naturelles ? Si notre corps n’est manifestement pas conçu pour recevoir naturellement de telles quantités de créatine par l’alimentation, quels pourraient être les effets à long terme d’une supplémentation ?
Face à ces interrogations, la science apporte aujourd’hui des réponses éclairantes sur l’efficacité, la sécurité et les véritables besoins en créatine de notre organisme.
Voici un tour d’horizon des questions les plus fréquemment posées sur la créatine et ce que la science en dit.
Qu’est-ce que la créatine ?
C’est le constituant essentiel de la phosphocréatine qui est présente dans le muscle et dont la dégradation contribue de façon majeure à la libération d’énergie pour des efforts dont la durée va d’environ 5 à 60 s.
La supplémentation en créatine augmente-t-elle vraiment les réserves corporelles de créatine ?
Oui, particulièrement chez les sujets qui mangent peu ou pas de viande et dont les réserves normales de créatine sont basses. Des études montrent une augmentation significative des niveaux de phosphocréatine, bien que cela dépende de l’individu et de ses réserves de base.
Quels sont ses effets documentés sur la performance ?
Les études menées en laboratoire, sur ergocycle, montrent de façon concordante que l’administration de créatine (0,43 à 0,071 g/kg/jour, soit 3 à 5 g/jour pour une personne de 70 kg) est sans effet sur la performance réalisée lors d’un effort isolé de 10 à 30 s. Cependant, si les efforts sont répétés avec des périodes de récupération suffisantes, environ les deux tiers des études rapportent une amélioration de la performance allant de 4 à 18 %. La moitié des études où l’on examinait l’effet de la supplémentation en créatine sur la force musculaire ont révélé une amélioration (de 6 à 25 %). Il serait donc possible que la créatine améliore la performance dans des disciplines sportives où les athlètes doivent répéter des efforts intenses mais de courte durée, entrecoupés de périodes de repos (ex. sports de raquette, de combat et collectifs). Il serait aussi possible que la créatine permette aux athlètes de diverses disciplines sportives, y compris ceux qui n’ont à réaliser qu’une seule fois l’exercice (ex. sprint sur piste), de s’entraîner davantage et mieux s’ils font de l’entraînement par intervalles bien structuré.
Est-ce que la supplémentation en créatine peut améliorer la performance dans un sport d’endurance comme la course à pied ou le cyclisme ?
Aucune étude ne rapporte d’effet de la créatine sur la consommation maximale d’oxygène (VO2max). Les études réalisées sur le terrain, en course à pied, en natation et en cyclisme, ne montrent pas d’effet bénéfique direct de l’ingestion de créatine sur la performance. Mais la supplémentation en créatine pourrait améliorer le stockage du glycogène musculaire lorsqu’elle est consommée avec des glucides, réduire les dommages musculaires et améliorer la récupération après un exercice intense.
La créatine peut-elle apporter des bienfaits musculaires sans exercice ?
Oui, mais ces bienfaits sont limités. Des études ont montré qu’une phase de charge (20 g/jour pendant 5 à 7 jours) ou une consommation modérée (3 g/jour sur plusieurs semaines) peut augmenter les stocks musculaires de créatine même sans exercice. Toutefois, ces effets sont bien plus significatifs lorsqu’elle est combinée à un entraînement physique.
Une alimentation normale peut-elle combler les besoins quotidiens en créatine ?
Oui. Les besoins quotidiens en créatine sont de 1 à 2 g. Ils sont facilement comblés (sauf peut-être chez les végétariens), car il y en a dans la viande que l’on mange et notre foie en synthétise. Les surplus sont éliminés par le rein dans l’urine sous forme de créatinine.
Quels sont les effets secondaires connus des suppléments de créatine ?
Il y a parfois des cas de douleurs gastro-intestinales, de diarrhées et de crampes musculaires. La supplémentation en créatine s’accompagne d’un gain de poids (de 1 à 2,5 kg) peut-être (mais cela reste à établir de façon claire) à cause d’une synthèse protéique accrue et certainement par rétention d’eau. Toutefois, sans être alarmiste, soulignons qu’on ne sait pas encore si la prise de créatine a des effets nocifs à long terme. Comme la créatine joue un rôle clé dans de nombreux processus physiologiques (ex. fonctions cardiaque et nerveuse ; développement des tumeurs ; spermatogénèse), il n’est pas impossible qu’une supplémentation prolongée de créatine ait des conséquences néfastes.
Le moment de la prise de créatine est-il important ?
Non, le timing n’a pas d’impact significatif. Ce qui compte, c’est une prise régulière et constante. Peu importe si l’on consomme la créatine avant, pendant ou après l’exercice : les effets ergogènes restent similaires.
L’ajout d’autres composés à la créatine améliore-t-il son efficacité ?
Oui. La prise de créatine avec des glucides ou des protéines peut en améliorer l’absorption par les muscles. Par exemple, des shakes post-entraînement contenant ces éléments peuvent optimiser les gains musculaires.
La créatine et la caféine s’opposent-elles ?
Non. Bien que des études plus anciennes aient suggéré une interaction négative, les recherches récentes montrent que cet effet est mineur. La consommation combinée ne compromet pas les bénéfices de la créatine.
La créatine stimule-t-elle la synthèse des protéines musculaires ?
Les données sont mitigées. Si certaines études n’ont observé aucun effet direct, d’autres suggèrent un rôle anti-catabolique, c’est-à-dire une réduction de la dégradation des protéines musculaires, surtout chez les hommes.
La créatine est-elle un anti-inflammatoire ?
Oui, potentiellement. Certaines études ont montré une réduction des marqueurs inflammatoires après un exercice intense, mais les preuves restent insuffisantes pour généraliser ces effets.
La créatine favorise-t-elle la récupération ?
Oui. Elle peut être utile après une blessure, une chirurgie ou une immobilisation prolongée en préservant la masse musculaire et en réduisant l’inflammation.
La créatine cause-t-elle le cancer ?
Non. Aucune étude scientifique rigoureuse n’a établi de lien entre la créatine et le cancer.
La créatine influence-t-elle la pression artérielle ?
Non. Chez les individus en bonne santé, elle n’a pas d’effet significatif sur les pressions systolique et diastolique.
La créatine agit-elle comme un stimulant ?
Non. Contrairement à la caféine, elle n’a pas d’effet sur le système nerveux central.
La créatine est-elle nocive pour les reins ?
Non, sauf en cas de problèmes rénaux préexistants. Des études à long terme ont confirmé sa sécurité chez les individus en bonne santé.
Quelle forme de créatine est la plus efficace ?
La créatine monohydrate reste la référence en termes d’efficacité, de sécurité et de coût. D’autres formes, comme le citrate ou l’ester éthylique, n’ont pas montré de supériorité significative.
La créatine disponible sur le marché est-elle pure ?
Pas toujours. Peu de suppléments de créatine vendus en ligne sont certifiées par des organismes tiers fiables. Privilégiez des marques réputées comme Creapure®, reconnue pour sa pureté (à 99,9 %). (N.B. Cet article n’est pas commandité.)
La supplémentation en créatine est-elle défendue par les règlements antidopage ?
Non. Mais le Centre canadien pour l’éthique dans le sport et l’Agence mondiale antidopage soulignent qu’en consommant des suppléments, les athlètes s’exposent à des risques pour leur santé en plus de la possibilité de se doper par inadvertance. Des études sérieuses ont révélé que plusieurs des suppléments en vogue dans les milieux sportifs contiennent, sans que cela soit indiqué sur l’étiquette, des produits défendus par les règlements antidopage. Une alimentation saine et diversifiée fournit tous les nutriments nécessaires. Bref, rien ne peut battre le talent, l’entraînement et une saine alimentation.
Conclusion
La créatine est un supplément efficace et sûr pour optimiser la performance sportive, la récupération et la masse musculaire.
Bien qu’elle puisse avoir certains effets sans exercice, ses bénéfices sont maximisés lorsqu’elle est combinée à un entraînement régulier.
Comme pour tout supplément, il faut respecter les doses recommandées et consulter un professionnel de la santé avant utilisation. Rappelons que l’Agence mondiale antidopage recommande aux athlètes d’éviter de prendre des suppléments sans motif médical.
Références
- Common questions and misconceptions about creatine supplementation : what does the scientific evidence really show ? (2021)
- Part II Common questions and misconceptions about creatine supplementation : what does the scientific evidence really show ? (2025)
- Lack of knowledge on the use and benefits of creatine – Discovering the price at which the potential risks outweigh the potential benefits of creatine supplementation for the average college student. (2012)
- Supplementing with which form of creatine (hydrochloride or monohydrate) alongside resistance training can have more impacts on anabolic/catabolic hormones, strength and body composition ? (2024)
- Analysis of the efficacy, safety, and cost of alternative forms of creatine available for purchase on Amazon.com : are label claims supported by science ? (2022)
- Creatine as a food supplement for the general population. (2021)
- Adverse effects of creatine supplementation : Fact or fiction ? (2000)
Aucun commentaire
Soyez le premier à laisser le vôtre !