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Le régime cétogène : une diète à gogo ?

La diète cétogène (pauvre en glucides) est très tendance dans certains milieux sportifs même si elle va à l’encontre de ce que les spécialistes recommandent généralement.

Parce qu’elle maximise l’oxydation des lipides pendant l’effort, plusieurs croient que la diète cétogène peut améliorer la performance dans les épreuves de longue durée, notamment en préservant les précieuses réserves glucidiques (sucres).

Est-ce la stratégie des champions ? Il semble que non, si l’on se fit sur les résultats de l’étude Competition Nutrition Practices of Elite Ultramarathon Runners (2016).

Trent Stellingwerff, directeur Sciences du sport du Canadian Sport Institute Pacific, s’est penché sur l’alimentation de trois coureurs d’élite (âge moyen : 35 ans) qui ont terminé 16 ultramarathons en 2014 (8 victoires, dont une au prestigieux Western States 100-Mile Endurance Run en 14,9 h).

Malgré l’absence de soutien professionnel en matière de nutrition, ces coureurs respectaient les recommandations scientifiques traditionnelles, soit un apport élevé en glucides avant et pendant les compétitions.

En compétition, ils consommaient très peu de lipides et de protéines. Mais ils consommaient beaucoup de glucides : en moyenne plus de 70 g par heure.

Ces glucides provenaient principalement de produits commerciaux. L’apport en caféine (912 mg) et en sodium (6,9 g) était également élevé.

Cette recherche ne prouve pas que la diète cétogène n’est pas meilleure que celle que la majorité des scientifiques recommandent. Mais d’autres recherches mettent sérieusement en doute la valeur d’une alimentation pauvre en glucides pour les athlètes.


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

  1. JF dit :

    Bonjour,

    Dans l’étude de Trent Stellingwerff mentionnée dans l’article plus (lien ici: https://ultraendurancenutrition.files.wordpress.com/2017/04/competition-nutrition-practices-of-elite-ultramarathon-runners.pdf) ressemble à une approche en épidémiologie rétrospective, publication intéressante mais peu fiable au regard du design : échantillonnage très faible de 3 vétérans ultracoureurs qui ont complété un questionnaire au sujet de leur nutrition lors de leurs courses de 100 Miles passées, leur mémoire est-elle assez fiable pour tirer des conclusions basées sur la Science probante?

    Dre Louise Burke, aussi mentionnée dans les commentaires plus haut, a publié une étude plus intéressante chez des marcheurs élites (https://physoc.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1113/JP273230): 21 marcheurs ont participé à cette étude. Malgré le protocole bien élaboré, l’intervention de 3 semaines est courte pour permettre une adaptation à telle ou telle alimentation.

    Pour l’étude FASTER mentionnée plus haut (lien ici: https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0026049515003340), 20 ultracoureurs (« 10% of finalists competing in sanctioned running events ≥ 50 km and/or triathlons of at least half ironman distance (113 km) ») qui sont adaptés à l’alimentation cétogène depuis 9 à 36 mois [ce qui est un bon départ], il a en effet été conclu que les athlètes oxydent davantage de lipides et leurs réserves en glycogènes n’ont pas été altérées mais surtout que leur performance n’a pas diminué même si pas améliorée.

    Il est compréhensible que dans le domaine du Sport et de la Nutrition il n’est pas aussi simple de réaliser des études à longue durée comme nous le faisons en Recherche clinique mais les enjeux ne sont pas les mêmes. En tant que coureur amateur, les données de la Science probante me guident surtout pour trouver ce qui pourrait fonctionner pour moi aujourd’hui.

    Respectueusement,

    1. Thibault dit :

      Merci de partager ces intéressantes observations. Ce sera intéressant de suivre l'évolution des connaissances en cette matière, surtout lorsqu'on aura enfin des données de suivi sur plusieurs mois. En attendant, peut-être que cet article vous intéressera : https://www.lanutrition.fr/endurance-que-faut-il-penser-des-complements-a-base-de-cetones

      1. JF Leiff dit :

        Merci pour le lien malgré que le domaine des suppléments m'intéresse peu malgré leur usage chez les athlètes Pros. Merci aussi pour l'échange et pour avoir pris la peine de répondre à mes 2 commentaires.

        Cordialement,

  2. Leiff dit :

    Bonjour,

    Merci pour cet article. Il est difficile pour des non experts comme moi d'avoir une idée juste sans que ce soit catégorique et la recherche de différentes références avec des résultats antagonistes permet de s'approcher de la vérité, s le mot est juste.

    Je souhaite vous demander ce que vous pensez des travaux du Dr Jeff Volek, selon vous est-ce que ça vaut la peine de s'y pencher ex: l'étude FASTER (lien ci-dessous)et les autres.
    https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0026049515003340

    Aussi, les travaux de Dr Tro et sa revue des publications ci-dessous:
    https://www.doctortro.com/do-athletes-need-carbs/

    Et pour finir, les recherches du célèbre Dr Tim Noakes sur l'alimentation faible en glucides, je mets en lien cette conférence mais je pense que Dr Noakes est respecté mondialement pour ses travaux sur le Central governor et la fatgiue mais aussi sur l'alimentation fable en glucides dans le sport de haut niveau avec des athlètes comme Mark Allen et Paula Newbie Fraser.
    https://www.youtube.com/watch?v=6WVLrQmnnAY

    Merci par avance pour votre aide à mieux déceler toutes ses contradictions.

    Cordialement,

    1. Thibault dit :

      Bonjour,

      Vous avez raison. Même pour les physiologistes de l’exercice comme moi, il est en effet difficile d'avoir une idée juste sur bien des sujets, surtout en matière de nutrition sportive. Pour une raison que j’ignore, la nutrition (et à plus forte raison la nutrition sportive) est un sujet où les idées reçues, les mythes et les idées de gourous patentés ont trop souvent le dessus sur les connaissances scientifiques et le gros bon sens.

      Je ne connaissais pas le écrits du Dr Jeff Volek, mais j’en ai pris connaissance à votre suggestion. L’article que vous pointez indique qu’on oxyde plus de lipides après qu’on ait pris le temps de s’adapter à une diète cétogène. En réalité, ce n’est pas surprenant, et cela ne révèle aucun avantage stratégique, ni pour l’athlète cherchant à performer dans les épreuves d’endurance, ni pour la personne qui cherche à perdre de la graisse. En effet, on métabolise automatiquement plus de graisse si on consomme plus de graisse, comme quand on suit un régime cétogène. Mais ça ne sert à rien. Ce qui compte, pour les personnes qui veulent perdre de la graisse, c’est de dépenser plus d’énergie qu’elles n’en consomment; point à la ligne. Peu importe si leur entraînement ou leur régime alimentaire leur fait oxyder plus ou moins de lipides. C’est aussi simple que ça. Et pour les personnes qui veulent s’améliorer dans les sports d’endurance, ce qui compte, c’est d’améliorer leur aptitude aérobie; et cela est pas mal moins difficile si, pendant l’entraînement, l’apport en glucides (sucres) est important, ce qui n’est évidemment pas le cas en diète cétogène.

      Je ne connaissais pas l'étude FASTER, mais j’en ai pris connaissance à votre suggestion. Même observation : évidemment le sujets oxydent davantage de lipides, mais en réalité, ça ne présente aucun avantage!

      Je ne connaissais pas les travaux de Dr Tro et sa revue des publications, mais je vais l’examiner dès que j’en aurai le temps.

      Vous faites allusion aux recherches du ‘célèbre’ Dr Tim Noakes sur l'alimentation faible en glucides. Il est vrai que mon collègue sud-africain Noakes a l’oreille des gens des médias, comme d’autres personnes qui osent avancer des trucs provoquant qui se veulent scientifiques. En réalité, cet individu charismatique est très critiqué par pratiquement tous les scientifiques de la nutrition sportive, notamment les plus grands cerveaux dans ce domaine comme le Canadien Trent Stellingwerf et l’Australienne Louise Burke. Il faut faire preuve d’esprit critique et se rappeler que les idées vendues en faisant référence aux succès de vedettes sportives n’ont pas une grande valeur scientifique.

      Faisant moi-même preuve d’esprit critique, je demeure ouvert à l’idée que nous aurons peut-être un jour des données prouvant que les athlètes et les gens qui veulent perdre du poids ont avantage à suivre une diète cétogène. Mais pour l’instant, mon interprétation des données de la littérature scientifique me laisse croire que seuls les épileptiques auraient avantages, sous supervision médicale, à suivre une diète cétogène, et que les athlètes devraient profiter d’un apport suffisant en glucides pour bien s’entraîner et bien performer, et que les personnes qui cherchent à perdre du poids devraient bénéficier d’une alimentation suffisamment riche en glucides pour avoir l’énergie nécessaire pour suivre assidûment leur plan d’entraînement.

      Je demeure ouvert pour examiner des arguments qui n’iraient pas nécessairement dans le même sens.

      guy

      1. Leiff dit :

        Bonjour Dr Thibault,

        Permettez-moi de saluer sincèrement votre esprit critique et votre ouverture aux arguments qui n’iraient pas nécessairement dans le même sens que les votres, en effet il est courant de lire des affirmations provenant d’imminents experts et basées sur des anciens concepts non remis en question et dont peu de gens savent de où ça vient, parfois même à devenir des dogmes quasi-religieux ce qui ne devrait pas être le cas en Science, je salue les héritier(ère)s de Galilée qui font en sorte que le Savoir est toujours remis en qustion de façon rigoureuse et surtout honnête intellectuellement.

        Je vous remercie d’avoir pris le temps de répondre à mes questions et d’exprimer votre interprétation des données de la littérature scientifique.

        Cordialement,

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