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Faut-il craindre l’anémie sportive ?

On appelle « anémie sportive » une condition qu’on retrouve souvent chez des athlètes d’endurance. Leur hématocrite est inférieur à la normale, mais tous les autres indicateurs de leurs réserves de fer affichent un niveau normal. Dans ce cas, il n’est pas question de véritable anémie. Si leur hématocrite est faible, ce n’est pas parce qu’ils manquent d’hémoglobine. C’est plutôt parce qu’ils bénéficient d’un grand volume plasmatique, grâce à leur bonne condition physique.

En effet, l’une des premières adaptations à l’entraînement aérobie est l’augmentation du volume de plasma, qui s’accompagne d’une amélioration de la fonction circulatoire : le cœur pompe plus facilement le sang s’il y en a un plus grand volume. Ainsi, de nombreux athlètes peuvent avoir un hématocrite inférieur et non pas supérieur à celui des personnes sédentaires en bonne santé.

L’hématocrite est le pourcentage relatif du volume de globules rouges par rapport au volume total de sang. Par exemple, un hématocrite de 45 % signifie qu’il y a 45 mL de globules rouges dans 100 mL de sang. L’hématocrite est plus élevé chez l’homme (environ 45 %) que chez la femme (environ 42 %). L’hématocrite peut être plus bas chez les personnes souffrant d’anémie, mais pas toujours. Comme l’entraînement cardiorespiratoire augmente à la fois le volume plasmatique et la production de globules rouges, bonne aptitude aérobie ne rime pas nécessairement avec hématocrite élevé.

Ce ne serait pas tant la réduction de la quantité d’hémoglobine mais plutôt la réduction de la concentration de ferritine (donc des réserves corporelles de fer) qui est corrélée avec la diminution de la performance. Il est clairement démontré qu’une véritable anémie ferriprive affecte beaucoup la performance dans les sports d’endurance. C’est logique : un sang pauvre en fer transporte moins bien l’oxygène que les muscles utilisent pour se contracter. Par contre, on ne sait pas très bien si les formes précoces de déficience en fer affectent la performance.

Les signes suivants peuvent être une indication de carence en fer et devraient vous inciter à consulter votre médecin : fatigue anormalement importante, irritabilité, nervosité, difficultés à s’entraîner et baisse des performances physiques. Attention, seule une mesure précise des paramètres sanguins liés au fer permet de bien apprécier les réserves de fer.

Il semble qu’à peu près un athlète sur trois aura tôt ou tard une carence en fer. Cette carence peut être due à un apport insuffisant en fer (fréquent chez les végétariens), mais surtout à une absorption insuffisante pendant la digestion, à un rejet accru dans les selles et à une excrétion accrue par la transpiration. Par ailleurs, un déficit en cuivre peut s’accompagner d’une anémie, car les métabolismes du fer et du cuivre (souvent présent dans les aliments riches en fer) sont fortement liés. À noter qu’en réaction à un manque de fer l’organisme s’adapte en l’épargnant.

Bref, contrairement à la croyance populaire, l’anémie sportive n’est pas une véritable anémie. Une fatigue chronique peut être le signe d’une anémie ; dans ce cas, il faut consulter un médecin pour connaître ses taux de fer et d’hémoglobine. La prescription d’un supplément de fer exige par ailleurs un suivi médical, un excès de fer pouvant notamment nuire à l’absorption du zinc et du cuivre, et augmenter le risque d’infarctus du myocarde chez les personnes à risque.


Véritable anémie

La déficience en fer est l’une des déficiences les plus courantes. Elle peut progresser par stades jusqu’à sa forme la plus sévère qu’on appelle « anémie ferriprive ». D’abord, le taux de ferritine (un précurseur du fer) baisse. Ensuite, le fer sérique (une forme de réserve du fer) baisse à son tour. Conséquemment, le nombre de globules rouges, le taux d’hémoglobine et donc l’hématocrite diminuent, d’où une aptitude réduite à l’effort physique. Cette cascade s’explique du fait que la moelle osseuse a besoin de fer pour élaborer les jeunes globules rouges (réticulocytes). Lorsque les réserves sont insuffisantes, la synthèse de globules rouges est ralentie.

Voilà pourquoi le taux de ferritine et l’hématocrite sont liés. L’anémie ferriprive est donc caractérisée par une faible quantité d’hémoglobine due à des réserves corporelles de fer insuffisantes. Les symptômes qui y sont associés sont notamment la pâleur, la fatigue, le manque de vitalité et la difficulté à maintenir sa température corporelle lorsqu’il fait froid. On estime que près de 5 % des femmes de 20 à 45 ans font de l’anémie ferriprive et que plus de 15 % sont confrontées à une forme de manque de fer qui ne cause pas d’anémie. Dans ce cas, le taux de ferritine dans le plasma sanguin est faible. À noter que l’exercice physique est contre-indiqué pour une femme enceinte qui souffre d’anémie.


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

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