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Stratégies pour limiter les interférences entre l’entraînement cardiorespiratoire et la musculation

Plusieurs études indiquent que l’entraînement de la force, lorsqu’il est accompagné d’un entraînement cardiovasculaire, résulte en une augmentation moins marquée de la force que si la musculation est exécutée seule. Toutefois, les athlètes doivent développer tous les déterminants de la performance pertinents, ce qui les oblige à en entraîner plusieurs en même temps. L’entraînement combiné (ou simultané), qui consiste à combiner par exemple musculation et entraînement cardiorespiratoire dans un même programme, devient donc inévitable.

Dans Strategies to optimize concurrent training of strength and aerobic fitness for rowing and canoeing (2011), des chercheurs espagnols présentent une revue des stratégies recommandées, en canoë-kayak et en aviron, pour minimiser les interférences dans l’entraînement simultané de l’aptitude aérobie et des différentes qualités musculaires.

On peut penser que leurs conclusions peuvent également s’appliquer à d’autres sports.

Périodisation de l’entraînement
La programmation traditionnelle de l’entraînement, où on cherche à développer plusieurs déterminants de la performance dans une même phase, ne semble pas procurer de surcharge suffisante pour optimiser le développement des qualités physiques des athlètes très entraînés. Chez les athlètes d’élite, la périodisation par blocs, alternant de courtes phases cherchant chacune à développer un nombre restreint de qualités techniques et physiques, semble mener à de meilleurs résultats. Des études menées auprès de kayakistes de calibre international révèlent qu’un programme enchaînant de courtes phases d’entraînement (moins de cinq semaines) où la charge d’entraînement est concentrée (> 50 % du volume d’entraînement musculaire et aérobie est dédié au développement d’une seule qualité physique) permet d’améliorer plus efficacement la performance en kayak.

Volume et fréquence d’entraînement
Plus la fréquence des séances d’entraînement et le nombre de semaines où l’athlète suit un entraînement combiné sont élevés, plus l’interférence risque d’être importante. Les chercheurs recommandent (pour optimiser le développement de la force et de la puissance tout en minimisant les effets d’interférence ou de surentraînement) d’exécuter un maximum de trois séances de musculation par semaine et d’ajuster individuellement le nombre de séries et de répétitions à exécuter. Un volume d’entraînement de 3 à 5 séries pour 4 à 6 exercices spécifiques et pluri-articulaires pendant 10 à 12 semaines semble adéquat chez les kayakistes de haut niveau.

Choix des qualités physiques à développer
Dans chacune des phases d’entraînement, les chercheurs proposent de choisir une seule qualité musculaire et une seule qualité énergétique à développer. Un modèle proposé par Docherty et Sporer suggère qu’on ne devrait pas entraîner la puissance aérobie maximale (PAM) en même temps que le volume musculaire ou la « force-endurance ». Selon eux, l’entraînement de ces qualités physiques engendre des adaptations opposées sur les mêmes composantes périphériques. Ils suggèrent donc d’entraîner la force maximale et la PAM dans une même phase, puis de viser l’hypertrophie ou le développement de la « force-endurance » en même temps que l’endurance aérobie, dans une phase subséquente. Toutefois, une seule étude a été effectuée jusqu’à maintenant pour apprécier la valeur de ce modèle. Ses résultats y étaient favorables.

Séquence des entraînements
Les études où les sujets étaient préalablement non entraînés indiquent que l’ordre dans lequel les séances d’entraînement aérobie et de musculation sont exécutées n’influe pas sur les adaptations liées à l’entraînement. Cependant, des études menées auprès de kayakistes de haut niveau indiquent que l’entraînement en endurance engendre une fatigue qui restreint le volume ou la qualité de la musculation.

Il serait donc préférable d’exécuter la séance de musculation avant la séance d’entraînement cardiovasculaire ou, si ce n’est pas possible, de laisser au minimum huit heures entre la séance d’entraînement cardiovasculaire et la musculation.

Les athlètes qui désirent développer davantage leur endurance aérobie pourraient choisir d’exécuter des séances d’entraînement cardiorespiratoire sollicitant principalement des groupes musculaires non spécifiques. Ces séances auraient pour effet d’améliorer la composante centrale de l’aptitude aérobie sans générer de fatigue interférant avec le développement de la force des groupes musculaires sollicités dans le sport de l’athlète.

Entraînement jusqu’à épuisement
Il semble que l’entraînement jusqu’à épuisement, parce qu’il est associé à un niveau de fatigue élevé qui peut affecter l’intensité des séances subséquentes, n’est pas idéal pour l’amélioration de la force, de la puissance et de la performance chez des rameurs d’élite.

Ainsi, certaines stratégies existent pour limiter les interférences entre l’entraînement cardiorespiratoire et la musculation chez les athlètes de haut niveau.


Avec la participation de Myriam Paquette


Lectures suggérées
A proposed model for examining the interference phenomenon between concurrent aerobic and strength training (2000)
Block periodization versus traditional training theory : A review (2008)


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

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