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Cycle menstruel, entraînement et performance

Que sait-on des effets du cycle menstruel sur la performance sportive de haut niveau ?

Trop peu !

Il est normal de penser que l’aptitude à réaliser de bonnes performances puisse fluctuer au cours du cycle ovarien, puisqu’on sait que l’estrogène influe notamment sur le système cardiovasculaire, le métabolisme énergétique et le cerveau, alors que la progestérone agit sur la température corporelle et la ventilation pulmonaire, notamment.

Bien que la grande majorité des sportives (tout comme, souvent, leurs entraîneurs) soient convaincues que leurs performances sont moins bonnes pendant certaines phases de leur cycle menstruel, les recherches où l’on a tenté de mettre en évidence la relation entre le cycle et la performance sportive en général sont plutôt anciennes, peu nombreuses et mènent à des résultats non convergents.

Si l’on se fie sur l’opinion des athlètes, c’est surtout à la fin de la phase lutéale (période prémenstruelle) et pendant les menstruations et que les performances sont les plus réduites. C’est d’ailleurs ce qui ressort d’une étude publiée il y a très longtemps : au début des années 1960 ! En revanche, on peut observer que certains records du monde ont été battus pendant les menstruations. Alors que certaines études font ressortir une amélioration de la performance pendant les menstruations, d’autres indiquent plutôt que les résultats sont meilleurs pendant la phase proliférative et d’autres encore… juste avant les règles !

Une étude indique que ni la force musculaire ni la performance dans des épreuves de courtes et moyennes distances de natation ne changent d’une phase à l’autre du cycle menstruel. En revanche, dans leur étude jalon menée au début des années 1970, Wearing et ses collègues (1972) concluaient que la période de menstruation était marquée par une réduction de la force isométrique et des performances au test de saut en longueur sans élan.

Sarwar et ses collègues (1996) concluaient que chez les femmes aménorrhéiques (absence de règles) prenant la pilule anticonceptionnelle, le muscle quadriceps est plus fort, mais plus fatigable et prend plus de temps à se décontracter à mi-cycle (jours 12-18) que pendant la phase lutéale, et la force diminue rapidement pendant l’ovulation, ce qui fait penser que les estrogènes accroissent la force musculaire. Mais Greeves et ses collègues (1999) ont plutôt observé que la force est plus grande au milieu de la phase lutéale et qu’elle est corrélée avec la concentration de progestérone dans le sang. Si la force n’augmente pas pendant la phase lutéale, c’est peut-être parce que la progestérone inhibe l’effet ergogène des estrogènes.

Au moins deux recherches indiquent que la capacité anaérobie ne change pas au fil des phases du cycle (que les femmes prennent ou non la pilule contraceptive), mais il semble qu’en présence du syndrôme prémenstruel, le cycle étirement-raccourcissement des tendons et des ligaments soit sensiblement altéré.

Nicklas et ses collègues (1989) ont montré que la restauration des réserves musculaires de glycogène est plus rapide pendant la phase lutéale. Cependant, l’utilisation du glycogène musculaire (en quelque sorte le supercarburant du muscle !) ne varie pas au fil des phases du cycle.

La non-convergence des résultats des diverses études pourrait s’expliquer par le fait que la concentration sanguine des hormones varie beaucoup à l’intérieur d’une même phase du cycle.


Le sujet du cycle menstruel n’est pas souvent abordé par les entraîneurs et les athlètes. Il est peut-être tabou ; sans doute davantage chez certaines personnes que chez d’autres. Chose certaine, il est méconnu, car c’est un sujet peu documenté.


Plusieurs se demandent s’il faut adapter l’entraînement au cycle menstruel, par exemple en cas de douleurs, de baisse d’énergie, d’irritabilité. Il n’y a pas de consensus scientifique sur cette question, d’autant plus que l’on ne dispose pas de preuves solides d’une réduction significative des qualités physiques et de la performance pendant certains moments du cycle menstruel.

Il est tout de même sage de recommander aux entraîneurs de demeurer constamment à l’écoute de chaque athlète et d’ajuster la charge d’entraînement selon l’état dans lequel se perçoit l’athlète. Il faut se rappeler que l’état physique et psychologique des athlètes peut changer grandement selon que la charge d’entraînement est plus ou moins élevée. Les douleurs, la baisse d’énergie, etc. dues à un entraînement intensif peuvent être bien plus prononcées que celles associées à telle ou telle phase du cycle menstruel.

Un entraînement très intensif, le stress, un poids et une adiposité très faibles ou une restriction alimentaire (apport insuffisant en calories, protéines, gras ou vitamines) peuvent s’accompagner de troubles du cycle menstruel. En général, une diminution de la charge d’entraînement corrige ces troubles.


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Guy Thibault

Professeur associé à l'École de kinésiologie et des sciences de l'activité physique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal, Guy a été, de 2017 à 2022, directeur des Sciences du sport de l’Institut national du sport du Québec. Ses deux derniers livres sont des succès de librairie : Entraînement cardio, sports d’endurance et performance ; et En pleine forme, conseils pratiques pour s’entraîner et persévérer.

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