L’abstinence sexuelle avant une performance sportive est une pratique qui nous vient d’aussi loin que de la Grèce antique. Mais qu’en dit la science aujourd’hui ?
Préliminaires
Désolé Mesdames, cet article ne s’intéresse qu’à l’orgasme du (véritable) sexe faible, celui dont on dit depuis des millénaires qu’il nuit à la performance sportive. Je vous encourage néanmoins à poursuivre la lecture : vous y trouverez des arguments que vous voudrez peut-être servir à votre homme lorsqu’il vous tournera le dos, prétendant qu’il doit garder ses forces pour une compétition imminente.
Quant aux effets de l’orgasme féminin sur la performance sportive, la communauté scientifique s’est très peu étendue sur le sujet. Il faut croire que les femmes n’ont simplement jamais eu l’idée d’évoquer cet aspect de leur intimité pour expliquer des contre-performances ou cacher un quelconque manque d’intérêt !
Spartiates frustrés
Les athlètes de l’Antiquité étaient reconnus pour leur infaillible maîtrise de soi et leur grande discipline. On dit que certains allaient même jusqu’à se soumettre à l’infibulation masculine, une mutilation génitale visant à complètement enrayer toute possibilité de rapports sexuels.
Si cette rigueur spartiate s’est aujourd’hui dégonglée, il n’en demeure pas moins que l’abstinence sexuelle est toujours considérée par plusieurs mâles comme un sacrifice précompétitif souhaitable. Une conviction qui repose en partie sur le précepte que la frustration sexuelle augmenterait l’agressivité, vecteur du désir de vaincre.
Mais qu’en disent les recherches ?
L’endurance aérobie, la force musculaire, la fréquence cardiaque, la pression artérielle et la concentration sanguine de testostérone, de cortisol, de glucose, etc., ne sont pas statistiquement différentes après orgasme ou abstinence. Étreindre sa conjointe (plutôt que de l’éteindre) jusqu’aux vertiges de l’extase ultime n’aurait donc aucun effet négatif sur la performance sportive le lendemain.
Le mot clé ici est « lendemain ».
Règle générale, la dépense énergétique pendant l’acte amoureux ne dépasse guère 50 calories, soit l’équivalent de monter deux étages par les escaliers. On n’épuise donc pas ses réserves énergétiques à batifoler !
Quelques études indiquent que l’homme s’étant délesté de son fluide séminal a besoin d’une certaine période de repos et de régénération afin de se retrouver au sommet de sa forme physique. Certaines études parlent d’une période minimale de récupération de 2 heures, tandis que d’autres évoquent des durées plus conservatrices, allant de 10 à 12 heures.
Il est toutefois de mise de mentionner que plusieurs de ces études furent réalisées en laboratoire, généralement sur des ergocycles, tapis roulants ou exerciseurs. Certains argueront donc que ces environnements sont bien différents des réalités de compétition sur le terrain, ou des sports d’équipe ou de combat. On peut donc concéder qu’il subsiste ici une légère ambiguïté… sur laquelle les apôtres de l’abstinence s’accrochent comme à une bouée de sauvetage.
« Women weaken legs »
Il n’y a pas que Mickey, l’entraîneur de Rocky Balboa, qui croit que « les femmes affaiblissent les jambes ». Mohamed Ali, sans doute le plus célèbre des abstinents, disait se priver de sexe jusqu’à six semaines avant tout combat important.
Bien qu’il n’y ait aucune évidence scientifique qui en corrobore la validité, on observe que plusieurs athlètes de sport de combat se soumettent à la frustration sexuelle en pensant (entre autres) augmenter leur agressivité. En revanche, plusieurs autres athlètes (surtout de sport d’endurance) parlent des bienfaits que leur procure une vie sexuelle équilibrée, sans privation, même la veille d’une épreuve importante. Sur le plan psychologique, les effets relaxants de l’activité sexuelle contribueraient à diminuer le stress précompétition et à améliorer la concentration. Les sexologues sont d’ailleurs formels : la satisfaction sexuelle est gage d’une meilleure qualité de vie, tandis qu’une abstinence prolongée augmente les risques de dépression.
Dogme s’essoufflant
Si les opinions et les croyances abondent sur le sujet chez les athlètes et les entraîneurs, la science nous démontre qu’il s’agit davantage de dogmes (fondés sur des expériences personnelles ou de simples croyances transmises de génération en génération) qui sont aujourd’hui dépassés.
Casey Stengel, le légendaire directeur général des Yankees de New York dans les années 50, résume bien le tout : « Ce n’est pas le sexe qui amoche nos gars, c’est le fait qu’ils passent leurs nuits à courir la galipote ! »
Même les organisateurs des Jeux olympiques ont emboîté le pas : ils distribuent, depuis déjà plusieurs olympiades, des montagnes de condoms durant les compétitions.
À Rio 2016, ce serait 450 000 petits sachets — soit une moyenne de 42 condoms par athlète —, qui auraient été fournis pour 15 jours de « jeux » !
Antithèse de l’ascétisme des sportifs du berceau de l’olympisme, cette effervescence sexuelle qui animerait les coulisses des villages olympiques n’empêche pas les records d’être continuellement battus. Il faut seulement s’assurer de succomber aux plaisirs de l’amour tôt dans la soirée, pour ensuite aller passer une bonne nuit et bénéficier d’un sommeil véritablement réparateur…
Texte initialement publié dans ESPACES Magazine
Source principale
Sexual Activity Before Sports Competition : A Systematic Review (2016)
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